Tales from the Loop est un jeu de rôle publié par l’éditeur suédois Free League Publishing. Sorti en mars 2017 en anglais, ce livre de 192 pages vous permet de vivre des aventures mystérieuses dans la peau d’enfants des années 80. Les Goonies, c’est vous !
“MJ de bonne humeur : Salut les enfants !
PJ 1, irrité : Oh c’est bon, arrête d’être condescendant un peu !
MJ, calmé net par la réaction : Euh… non, j’ai dit ça car vous allez incarner des enfants aujourd’hui… dans le jeu, quoi.
PJ 1, gêné : Ah… euh… désolé.
MJ retrouve son entrain : Pas de souci, vous avez déjà vu Les Goonies ?
Silence des trois PJ.
MJ surpris, voire incrédule, mais se ressaisit vite : Vous avez déjà vu Stranger Things, alors ?
Silence pesant. Léger courant d’air.
MJ qui n’en croit pas ses oreilles… (oui, alors que c’est le silence) : Attendez, vous voulez dire que vous n’avez jamais vu ces trucs-là ? Mais comment est-ce possible ?!
PJ 2 : Bon ben ça va hein, on a une vie, on peut pas regarder tout ce qui passe à la télé.
MJ, toujours choqué, qui le regarde abasourdi, en clignant mécaniquement des yeux avant de reprendre : Non mais qu’est-ce que tu peux regarder de mieux que Les Goonies ? Film par excellence de l’enfance ! Meilleure aventure de tous les temps !
PJ 2, intimidé, répond très discrètement : Ben… on connaît pas…
MJ agrippe PJ 2 et le fixe d’un regard implorant, quelques centimètres séparant leurs visages.
MJ : CHOCO ! Tu connais Choco, quand même !
PJ 2, qui n’ose pas regarder MJ dans les yeux, baisse le regard et répond à voix très basse : Euh… désolé.
MJ le lâche brusquement et s’assied, les coudes sur la table et la tête dans ses mains, le regard perdu.
PJ 3, qui s’approche précautionneusement : Ça va, MJ ?
MJ, le regard dramatique et sur un ton alarmiste : Quel est ce monde ? Où sommes-nous ? Que nous arrive-t-il ?
Les 3 PJ se regardent, pas sûrs quant à la réaction à adopter.
PJ 1, avec un léger sourire réconfortant et faisant mine aux autres d’être enthousiastes : Non mais euh… nous, on demande qu’à découvrir hein. C’est quoi Les Goonies ?
MJ, qui boude et se retourne en croisant les bras : Non mais ça sert à rien que je vous explique, vous pourriez pas comprendre.
PJ 2 regarde les autres d’un air encourageant, comme s’ils avaient trouvé le moyen de réconforter MJ : Si, si, vas-y, explique-nous. Ça a l’air trop bien, Les Goomies…
MJ, qui boude toujours, répond du tac au tac, toujours sans les regarder : Les GooNies !
PJ 3 soupire et hoche la tête d’un air hypocrite en regardant PJ 2, comme s’il venait de dire la plus grosse bêtise au monde : Mais oui, c’est Les GooNies, espèce d’imbécile. Bon, vas-y MJ, parle-nous des GooNies.
MJ se tourne timidement vers le groupe, revigoré par ses camarades de jeu qui l’implorent (si, si) de lui parler de ce chef-d’oeuvre qu’est Les Goonies. Il retrouve le sourire et bondit sur sa chaise pour se tourner vers les PJ.
MJ, plein d’enthousiasme : Alors Les Goonies, c’est une aventure GÉ-NIALE ! C’est l’histoire de Mickey, Data, Choco, Brand, Bagou… euh…
Les 3 PJ se regardent et commencent à regretter. Ça va être long.
MJ, qui compte sur ses doigts : … Stef, Andy… euh y avait qui encore… ah oui, Shinok ! Et la famille Fratelli ! Les criminels qui vont poursuivre Les Goonies ! Parce qu’en fait, ils vont découvrir une carte au trésor dans leur grenier, celle de Willy Le Borgne, un ancien pirate de la région qui était borgne (c’est pour ça qu’on l’appelle Willy Le Borgne) …
PJ 1 regarde discrètement sa montre. Seulement une minute s’est écoulée. Il tape dessus pour être sûr qu’elle n’est pas cassée.
MJ, qui sautille sur sa chaise en racontant : … et alors, ils vont trouver une grotte pleine de pièges et puis y aura un piano fait avec des os humains et il faudra jouer les bonnes notes pour tomber dans la grotte avec de l’eau parce que de là…
1 minute 30. C’est pas possible, elle doit être cassée, cette montre.
MJ : … et puis ils vont enfin trouver le bateau avec le trésor de Willy Le Borgne mais ATTENTION, car les Fratelli sont là et ils veulent le trésor aussi. Shinok arrive alors et il va sauver les enfants et puis ils vont sortir de là mais ils pourront pas prendre le trésor car la caverne s’écroule…
1 minute 37. Non mais le temps se fout de leur gueule, là !
MJ : … mais c’est pas grave, car Les Goonies resteront toujours ensemble et à la fin le papa de Mickey il frappe le papa de l’autre petit con et Les Goonies trouvent quand même quelques pierres précieuses et ils ont gagné et c’est une super aventure !
Les PJ se rendent compte après quelques secondes que l’histoire est – enfin – finie et réalisent qu’ils s’étaient affalés sur leurs chaises. Ils se redressent brusquement. PJ 3 se frotte les yeux, il était presque en train de somnoler.
PJ 2 : Ouais donc en gros, c’est juste une aventure avec des gosses, quoi…
MJ : …”
On décortique Tales from the Loop
Au format A4, en couverture rigide et au papier cartonné, Tales from the Loop illustre d’emblée le cadre de jeu avec une carte des îles suédoises où (peut) se déroule(r) la campagne. S’ensuivent les crédits et le sommaire. Tales from the Loop contient :
- 01 – Welcome to the Loop (8 pages) définit le jeu de rôle, aborde l’univers de ce jeu spécifique et explique comment y jouer ;
- 02 – The Age of the Loop (20 pages) entre dans le vif du sujet et décrit les années 80 alternatives de Tales from the Loop, s’intéressant essentiellement au contexte suédois, ses références culturelles, sa technologie, le fait d’y être un enfant et finalement le Loop, ce grand réacteur au beau milieu des îles ;
- 03 – The US Loop (14 pages) constitue l’équivalent américain du chapitre précédent, avec les mêmes thèmes abordés mais cette fois-ci dans la ville perdue de Boulder City, au fin fond du Nevada (dont une carte est également disponible) ;
- 04- The Kids (16 pages) décrit les archétypes de gosses (ou gamins) que les joueurs devront incarner – rat de bibliothèque, geek, paysan, athlète, populaire, rockeur, fauteur de trouble, bizarre -, énumère les attributs/compétences et pose toutes les questions liées à la création de personnage ;
- 05 – Trouble (12 pages) définit les règles de résolution, de coopération et de conflit, tout en décrivant de manière plus exhaustive les compétences et leurs effets bonus ;
- 06 – The Mystery (22 pages) explique comment jouer un scénario dans Tales from the Loop, avec l’alternance entre la vie ordinaire et le mystère, la technologie, les aléas de la vie, la gestion des PNJ et des relations, les lieux, l’ambiance, etc.
- 07 – The Mystery Landscape (14 pages) propose plusieurs pistes de scénarios (et leurs PNJ) permettant aux gosses de jouer façon bac à sable dans le contexte suédois (ou américain, le livre suggérant des alternatives en termes de noms et de lieux) ;
- 08 – The Four Seasons of Mad Science (4 pages) présente le contexte des quatre scénarios (qui peuvent se jouer en Suède ou aux États-Unis) qui suivent et qui peuvent former une campagne ;
- 09 – Summer Break and Killer Birds (16 pages) est le premier scénario du livre et propose un fil rouge, des PNJ détaillés ainsi qu’une flopée d’aides de jeu (cartes, plans) à l’adresse du MJ ;
- 10 – Grown-up Attraction (12 pages) est le second scénario, dans lequel les adultes commencent à disparaître dans des circonstances étranges ;
- 11 – Creatures from the Cretaceous (16 pages) est le troisième scénario, qui commence par la disparition d’un chien et prend une tournure (très) inattendue ;
- 12 – I, Wagner (22 pages), le dernier scénario, repose sur le même principe que les précédents mais s’avère plus long et nécessitera en conséquence plus d’une session de jeu.
Tales from the Loop se boucle sur une longue liste de souscripteurs, une illustration ainsi qu’une fiche de personnage.
Univers : Moi je veux être comme Peter Pan, je ne veux pas grandir !
Si, comme moi, vous avez grandi avec Stand by Me, Les Goonies, Retour vers le Futur, E.T., Hook, Nuit de Folie, L’Histoire Sans Fin, Chéri j’ai rétréci les gosses, etc. vous avez adoré Stranger Things. La série de Netflix, véritable phénomène, a repris les codes d’une époque où nous ne jurions que par l’aventure. Une aventure improbable et dont l’unique but était de faire rêver des geeks en culotte courte. La cerise sur la gâteau, c’est que Stranger Things ne rend pas seulement un bel hommage à ces films, elle met à l’honneur le jeu de rôle. Toute la série se construit autour d’un trio de gosses happés par une quête teintée de mystère, pour le bien et la justice, face à un monstre énigmatique. Les références à ce loisir, inédit dans les années 80, parsèment la série. Et parce qu’être spectateur ne suffit pas, il nous fallait un jeu de rôle dans le même esprit : Tales from the Loop.
Difficile de mieux résumer Tales from the Loop, qui aurait très bien pu s’appeler Stranger Things – Le Jeu de rôle. À quelques nuances près puisque le jeu a beau se dérouler dans les années 80, il en propose une version alternative. Robots et engins volants existent et intègrent naturellement le décor. Le cadre de base se situe par ailleurs sur les îles Adelsö, Munsö, Ekerö et Svartsjölandet, située autour du lac Mälar en Suède. Un second contexte aux Etats-Unis est toutefois disponible, les deux proposant des références culturelles à l’adresse du MJ. Ce qui compte, c’est que le jeu retranscrit avec brio l’ambiance années 80. Fêtes à la piscine après l’école, petit ciné crade du coin, VHS, posters de rock qui tapissent les chambres, walkman, skateboard, bandes du lycée – tout ce qui caractérise cette époque (cliché à l’appui) est présent. Les joueurs incarnent des gosses aux archétypes singuliers et peuvent s’identifier à tous ces enfants-héros qui ont bercé leur enfance. La lecture de Tales from the Loop propose un vrai bond nostalgique dans le temps et maîtrise toutes les références de l’époque.
Design et lisibilité : du grand art
Anecdote cocasse : Tales from the Loop s’inspire en réalité des tableaux de Simon Stålenhag. Un artiste de science-fiction qui a réinventé les années 80 dans son oeuvre intitulée… Tales from the Loop. Aussi, la plupart des oeuvres du bouquin sont issues de son travail. L’artiste a toutefois dessiné de nouvelles illustrations pour le jeu et son travail est remarquable. L’illusion de réalisme qui émane des illustrations, ainsi que l’ambiance rétro qu’elles dégagent, est tout simplement bluffante. J’ai rarement vu un si joli travail dans un bouquin de jeu de rôle. Heureusement, le travail d’édition est à la hauteur d’une telle qualité. La structure des pages, les notes en post-it, les plans et autres aides de jeu trahissent un souci du soin et du détail implacable. Un tel niveau de perfection est rare, il faut le saluer.
En marge de ce travail éditorial impeccable, on aurait pu craindre un souci de rédaction. Pensez-vous ! Là aussi, Free League Publishing sort le grand jeu (sans mauvais jeu de mots) et propose avec Tales from the Loop un livre de règles parfait – avec sa campagne, qui plus est. Tout est clair, bien structuré, on retrouve rapidement les informations qu’on cherche et on comprend les mécanismes du jeu ainsi que son esprit à la première lecture. Les exemples ainsi que les conseils accompagnent le lecteur de A à Z et on sort de la lecture du livre avec une idée limpide de ce vers quoi nous emmène Tales from the Loop. Des jeux comme ça, on en veut plus !
Suppléments : la cohésion, tout simplement
Free League Publishing a le souci du travail bien fait et de la cohérence. J’ai déjà pu le remarquer avec Coriolis : The Third Horizon (dont la critique sera disponible dans les prochaines semaines). Le soin apporté au design dépasse donc le simple livre et concerne également l’écran, qui affiche des faux airs de Rencontre du Troisième Type. Et si la patte artistique de Stålenhag fait mouche, il faut aussi saluer la face intérieure, qui résume parfaitement les règles et le déroulement de la partie. À ce magnifique écran s’ajoutent une carte recto-verso (pour les îles suédoises ou le contexte américain) et un set de dés. Purement accessoires, ces dés restent très jolis et complètent la gamme telle une cerise juteuse et reluisante au sommet d’un gâteau.
Système de jeu : un système parfait
Je pèse mes mots : le système est parfait. Celui-ci est entièrement au service de la narration, sans pour autant s’effacer. Il reprend le système de résolution de Mutant : Année Zéro (qui sortira bientôt en français) et implique donc de jeter autant de dés 6 qu’une caractéristique (et éventuellement une compétence). Un seul 6 suffit dans la plupart des cas pour réussir une action. Exceptionnellement, deux ou trois 6 peuvent être requis. À cela s’ajoute une série de règles supplémentaires qui assaisonnent le système pour en faire un met savoureux. Par exemple, les objets iconiques des gosses (comme la radio du rockeur ou le ballon de basket de l’athlète) rapportent des bonus et incitent le joueur à en faire un usage varié. Un vrai plus pour l’ambiance, l’immersion et la narration.
Dès la création de personnage, d’ailleurs, Tales from the Loop invite chaque joueur à s’approprier son avatar. Les questions posées pour façonner sa personnalité ainsi que la dynamique du groupe permettent d’emblée de s’imprégner des personnages et de l’ambiance. De même, la narration repose sur l’alternance des scènes du mystère et des scènes de la vie de tous les jours. Ces dernières permettent aux joueurs de développer leurs relations avec leurs familles, leurs amis, etc. mais impliquent également des bonus dans le jeu. Cette symbiose entre système et roleplay synthétise parfaitement l’esprit de Tales from the Loop. Un grand jeu, tout simplement.
Et quand on joue ? Retrouve l’enfant qui est en toi
Avec tant de qualité sous la main, c’est fébrile que j’ai lancé ma partie de Tales from the Loop. Il fallait bien que ça coince quelque part, non ? Eh bien non ! La mayonnaise a vite pris et les joueurs se sont créé des personnages très typés, reprenant les gros clichés des années 80. Le cas social complètement délaissé par sa mère qui passe sa journée à fumer en écoutant la radio. Le sportif chouchouté par sa mère. Le gars populaire du lycée qui en a marre d’être au coeur de l’attention et qui va profiter des vacances d’été. Enfin, c’était sans compter sur son petit frère qui lui fout la honte un peu partout et parle de Donjons & Dragons ad nauseam. Bref, création de personnages : check !
Le système a permis de raconter l’histoire que j’avais préparée et les questions posées lors de la création des gosses m’a donné une flopée d’idées pour le roleplay et les scènes ordinaires de leur vie d’enfants. Le contrat est donc largement rempli. Nous avons eu quelques soucis avec les compétences, ne sachant pas toujours lesquelles utiliser pour des cas spécifiques (je pense au soin, même si on joue avec des enfants…). Les joueurs ont également souligné la difficulté parfois de se replonger dans la peau d’un enfant de 10 à 15 ans. Mais il s’agit là de défauts qui n’en sont pas réellement car ils n’entravent en rien le plaisir de jeu. J’ai pour ma part passé un excellent moment et n’attend plus que de trouver un créneau horaire pour caser la campagne dans mon agenda.
Conclusion : Jeu de rôle de l’année ?
Je sais, je sais, j’ai l’air d’un fanboy surexcité qui a foutu un coup de pied au derrière de son esprit critique. Je ne peux en effet nier que l’intérêt nostalgique de Tales from the Loop constitue un argument de taille. Aussi, si vous avez zappé cette période de la révolution culturelle, vous risquez de passer à côté de tout ce qui fait la saveur du jeu. En revanche, si cet univers, cette époque et cette ambiance vous parlent, Tales from the Loop est un incontournable dans votre ludothèque. Si l’anglais du bouquin reste accessible, je conseille toutefois aux rôlistes qui ne le maîtrisent pas de patienter. En effet, Arkhane Asylum annonçait récemment la traduction française du jeu. Une très bonne nouvelle, donc !
Et vous, que feriez-vous si vous pouviez vivre les aventures qui ont fait rêver tous ces gosses qui ont regardé Les Goonies, Stand by Me, Stranger Things, etc. ? Dites-nous tout !
À bientôt sur Sitegeek,
Musa
Verdict
Univers
Design et lisibilité
Suppléments
Système
Et quand on joue ?
Comme ces films et séries de notre enfance, Tales from the Loop vous propose de redevenir des gosses le temps d'une aventure teintée de mystère et d'intrigues (réelles ou imaginées ?). Mais attention, n'oubliez pas d'être rentrés pour le dîner !
Salut,
Quelle critique enthousiaste !
J’ai moi aussi craqué pour ce jeu, la raison première étant bien sûr la nostalgie des années 80, et le genre “aventures de gamins à BMX” des films de l’époque. Je n’y ai pas encore joué. J’ai eu aussi l’impression que les règles semblaient favoriser ce que préconise le jeu, à savoir pas mal de narration, un esprit de groupe (en se refilant les bonus), l’alternance avec des scènes de la vie courante (pour soigner les Conditions), etc.
Tout ceci m’a paru intéressant, cependant je me pose quelques questions :
– Est-ce que les “Conditions” ne s’accumulent pas un peu rapidement, et du coup il faut aller se faire consoler par son grand frère un peu trop souvent, au point que ça en devienne artificiel ?
– Mes joueurs étant plutôt d’un naturel “bourrin”, j’ai peur qu’ils arrivent avec leurs réflexes habituels, c-a-d se procurer des armes, ou en construire, afin de régler les problèmes, ce qui ne me semble pas être l’esprit du jeu, et de plus le système ne le supporte pas…
– Je n’ai lu que le premier scénario de la campagne, et il m’a semblé assez simpliste. Est-ce que ça le fait quand même quand on le joue ? Est-ce que le reste de la campagne est plus abouti ?
Salut (et désolé pour le délai de réponse !),
Tout d’abord, merci pour le commentaire :-)
Ensuite, pour répondre aux questions :
1) Je n’ai joué qu’une partie à ce stade (même si elle était assez longue, finalement) et je n’ai pas ressenti ce problème, concernant les Conditions. Pour une raison assez simple finalement, puisque les scènes “d’action” sont entrecoupées par des scènes de la vie quotidienne. Les PJ sont des gosses, ils ne sont pas censés passer la nuit dehors (et s’ils le font, leurs parents – du moins ceux qui ont des parents normaux parmi les PJ – sont censés s’en affoler !). Il faut vraiment resituer l’enfance au coeur du jeu, avec tout ce que ça implique. Donc oui, les Conditions arrivent “vite” car un gosse, mine de rien, c’est plus fragile qu’un paladin niveau 10 :-)
2) (Voir dernière phrase ci-dessus :p) Alors personnellement, voici ma philosophie en tant que MJ : mes joueurs peuvent faire ce qu’ils veulent mais leurs actions ont des conséquences. Si ce qu’ils font est complètement déphasé avec l’esprit du jeu, les conséquences sont logiquement censées être rudes. Attention, je ne dis pas qu’il faut “punir” les joueurs, je dis juste qu’en toute logique, le jeu est censé prévoir des conséquences graves pour des actions graves. Prenons l’exemple de Warhammer : quand un joueur qui ne connaît pas bien ce jeu et est un adepte de D&D se lance dans un combat, il risque de foncer dans le tas… et de mourir, car Warhammer n’est pas D&D et que se ruer tête baissée est dangereux. Idem ici, si des gosses fabriquent des armes pour s’attaquer à des adultes, ils risquent de se blesser. Car dans l’univers du jeu, un gosse c’est plus faible qu’un adulte, tout simplement.
3) Le premier scénario (les oiseaux ?) est très dirigiste et très bien encadré. Je l’ai fait jouer et je dirais que, comme pour tout scénario, il incombe au MJ de mettre les joueurs en ambiance. De mon souvenir, les joueurs avaient apprécié la partie, ils avaient juste pour certains souligné l’aspect dirigiste (et la difficulté d’incarner des enfants). Mais je pars du principe que Tales from the Loop est un jeu à campagne et qu’il faut utiliser le contexte livré par le bouquin pour y jouer. Le scénario de base, c’est un peu le play-test et tu verras qu’à la phase de création de perso, t’auras déjà plein de petites idées sympa à ajouter dans ton scénar’, notamment pour les scènes de la vie de tous les jours.
Voilà, en espérant avoir répondu à tes questions :-)
L’intro m’a fait sourire, rien qu’en tant que joueuse, il a fallu que je sorte… Le trailer des Goonies ! En références aussi et au vu des photos, même si les robots et pas forcément d’E.T téléphone maison, j’avais songé à rencontre du 3ème type et super 8 dans le même ton.
Nous sommes de nombreux trentenaires nostalgiques avec les mêmes références, ce qui peut aider à apprécier d’autant plus le jeu si de la même génération. J’ai suivi le crowfunding de TFP, mais ne me suis pas spoliée pour pouvoir y jouer vu qu’il était en haut de ma liste, sachant que je fais du forcing auprès de notre mj tout en contaminant le reste du groupe… :p
Pour ceux que cela freine : Le fait de jouer des gosses permet tantôt un brin de légèreté, d’humour, naïveté et de spontanéité, et sans doute pleins de bêtises à faire également pour plus d’immersion, comme l’inverse selon le contexte familial/scolaire/social/culturel qui a pu être décidé ou prévu d’être joué. Comme avec l’OS Hellywwod sur période 1931 où je m’en suis donnée à cœur joie au départ pour trancher avec l’univers sombre tout en gardant la cohérence dans l’évolution du personnage, où forcément vient le basculement vers la prise de conscience en y ajoutant un total rejet des adultes qui s’affirme plus en amont (même si saut dans le temps par la suite, cela aidera à ficeler l’incarnation de la version adulte ici ;)), malgré un monde forcément inquiétant, pleins de mystères voire sinistre. Ne m’étant toutefois pas spoliée, Tales from the loop semble plus light sur ce dernier point. Ai-je tort à ce propos ?
Tout d’abord, on sent tout l’amour pour cette époque dans le commentaire, ça fait plaisir :-)
Deuxièmement, je pense que les joueurs et le MJ peuvent se mettre d’accord sur le ton qu’ils souhaitent donner à Tales from the Loop. Tel que je le vois, il y a un vrai mélange d’émotions, pour une raison simple : on incarne des enfants et donc l’ascenseur émotionnel est forcément beaucoup plus actif à 10-15 ans.
Je donne un exemple concret dans ma partie :
Deux joueurs incarnaient des frères (de 13 et 10 ans, si je ne m’abuse). Le plus grand s’était entiché de la voisine d’en face (que j’interprétais en tant que MJ), ce qui donnait lieu à des échanges savoureusement innocents et touchants. Ensuite, le petit frère venait perturber la session de drague du plus grand en lui parlant de Donjons & Dragons, ce qui nous permit de rire. Finalement, les joueurs partirent à l’aventure en quête d’un scientifique fou, ce qui donna lieu à l’excitation et la trépidation. Enfin, lorsqu’ils rentrèrent à la maison, les deux frères virent leurs parents se disputer (c’était le problème qu’ils s’étaient choisis lors de la création de perso) et partirent se réfugier dans la chambre de leur grande soeur rebelle pour qu’elle les réconforte. Bref, voilà en une partie toutes les émotions mises en avant et je pense sincèrement que dans un jeu comme Tales from the Loop, ce sont aussi les émotions qu’il faut mettre en avant et pas seulement la dimension aventure/enquête/mystère.
D’ailleurs, un de mes joueurs m’a dit l’autre jour qu’il avait presque préféré les sessions de jeu de la vie ordinaire à celles de l’enquête… Bref, j’ignore si je me fais bien comprendre mais pour répondre à la question, ce jeu propose d’incarner des enfants, avec tout ce que cela implique. Le ton changera selon les circonstances, même si comme toujours les joueurs doivent s’entendre sur le ton général (délire ou sérieux ?).
Et question durée de vie :
Au-delà de quelques one shot il y a matière à faire de la campagne au long court ?
Est-ce que les joueurs adultes ne risquent pas de se lasser rapidement ?
De prime à bord ce jdr me fait l’effet du dernier jouet que l’on reçoit quand on rentre dans l’adolescence. On le reçoit avec un sourire, parce qu’on sait qu’il marque la fin d’une époque, mais la passion n’y est plus.
Alors pour la question pratique, oui, une campagne est prévue dans le bouquin ainsi qu’un bac à sable pour pouvoir vraiment exploiter le contexte donné (sachant qu’il y a le contexte suédois et le contexte américain). Donc une campagne est parfaitement envisageable et la longueur variera de nombreux facteurs comme l’intérêt des joueurs, forcément, et la capacité du MJ à exploiter cet univers de jeu.
En revanche, pour ce qui est de la mécanique, le jeu prévoit bien de la progression mais il ne faut pas oublier que les PJ sont des gosses et non pas des guerriers entraînés. Les effets de la progression n’ont donc pas le même impact. Et c’est voulu, puisque le jeu incite clairement aussi au RP et donc à une évolution basée sur la personnalité, les relations, les émotions, etc.
Quant à la question du succès éphémère, c’est une question très subjective. Aujourd’hui, tout est effet de mode. Même Stranger Things, pour reprendre la série dont s’inspire entre autres le jeu, faisait les gros titres l’été dernier avant de devenir “SO 2016”. Il s’agit donc bien d’une question de passion. À quel point le MJ et les joueurs aiment ce type d’univers et sont prêts à interpréter des enfants, sachant qu’une fois l’âge de 16 ans atteint, ils devront quitter l’aventure. Qu’est-ce que ça a comme impact sur les relations, les émotions, le sens de la vie et du fait de grandir. En explorant le jeu sous cet angle, je pense qu’il peut vraiment être sympa.
Donc pour répondre à cette partie de ta question, c’est à toi de voir ce que tu cherches dans un JDR. Mais pour ce qu’il offre, Tales from the Loop est – à mon très humble avis – tout simplement parfait.
En espérant avoir pu t’aider :-)
Merci pour cette critique, je vais regarder ça de près quand il sera en vente sur le site du créateur ;)
Merci pour le commentaire. Comme je l’écris dans la critique, la traduction est prévue et d’après l’éditeur, ce serait pour début 2018. Mais l’anglais ne pose aucun souci, fais-toi plaisir ! :-)
Bonne nouvelle !
Arkhane Asylum lance un ulule pour la version française !