Mythic Battles Pantheon est un jeu de rôle édité par Black Book Editions et sorti en septembre 2017. Comptant 200 pages, ce jeu au format A4 ressasse la mythologie grecque, avec un système digne de l’Antiquité…
“MJ entre, vêtu d’une toge blanche découvrant son épaule droite. Il marche d’un pas solennel, sous les regards dubitatifs des 3 PJ.
PJ 1, aux deux autres : Bon ben, j’imagine qu’on va jouer dans un contexte antique…
MJ, avec son fameux sourire au mélange improbable de chaleur et de condescendance : Tu as tout à fait raison, jeune homme. *En parlant fort et en faisant un geste théâtrale de la main* Installe-toi donc et laisse-moi te conter l’Histoire de notre beau pays hellénique.
PJ 1 : Euh… Je suis déjà assis.
PJ 2 murmure à PJ 3 : C’est quoi un pays hellénique ?
MJ, ignorant complètement questions et remarques, pose un pied sur sa chaise Ikea et d’une voix dramatique : À l’origine vivaient les Titans ! Cronos, fils du Ciel Ouranis et de Gaïa la Terre, était le Roi des Titans. Sa mère prophétisa que Cronos verrait un jour l’un de ses enfants le détrôner. Alors…
PJ 3 lève la main, interrompant MJ dans son envolée lyrique.
MJ, tâchant de garder sa voix pseudo-épique : Euh… oui ?
PJ 3 se racle la gorge : Eh bien euh… tu vas nous faire toute la mythologie grecque ? Non, parce que moi j’ai badminton après donc… euh… je veux juste savoir à quoi on va jouer.
PJ 2 apparaît ensuite subtilement en se penchant vers PJ 3 et lui demande : Eh, tu sais c’est quoi, toi, un pays hellénique ?
MJ, perturbé par l’interruption qui a gâché toute son introduction, ne sait pas tout de suite comment réagir. Il pose la main sur son genou. Son genou à terre. Le repose sur la chaise. Puis retrouve ce sourire plus ou moins sûr de lui et hoche la tête en plissant les yeux dans une tentative ratée de se montrer bienveillant.
“
Pause dramatique, tandis que MJ regarde par la fenêtre de la pièce, qu’il est d’ailleurs grands temps de laver car on voit plus très bien au travers.
MJ, reprenant subitement : Et la Grèce aura besoin de vous. En cet Âge de l’Espérance, dieux et titans sont prêts à se mener la guerre une nouvelle fois et à vous utiliser comme leurs pions. À vous de devenir les héros dont le monde a besoin. À vous d’affronter les créatures qui se sont échappées du Tartare.
PJ 2, qui s’est retourné vers PJ 1, toujours en murmurant : Ça aurait un rapport avec la bouffe ?
MJ : Serez-vous prêts à relever les défis qui vous attendent ? Serez-vous aptes à retrouver votre grande puissance et à combler les chants des bardes ? Nous le verrons en jouant à Mythic Battles Pantheon !
Il regarde alors avec satisfaction les PJ qui ne semblent pas du tout emportés par l’esprit théâtral de leur MJ et qui attendent non sans gêne que la partie commence enfin.
MJ : Des questions ?
PJ 2 lève la main, visiblement agacé.
MJ : Je t’écoute, jeune héros.
PJ 2, la voix irritée : Oui, est-ce que quelqu’un veut bien m’expliquer c’est quoi un pays hellénique ?!
MJ : …”
On décortique Mythic Battles Pantheon
Après ses crédits et une table des matières étalée sur deux pages, une mise en bouche scénarisée pour situer le décor et une introduction faisant le lien avec le jeu de plateau dont il est issu, Mythic Battles Pantheon contient :
- 1 : Créer et faire évoluer un héros (20 pages) marque le début du manuel du joueur et décrit dans le détail tous les éléments figurant sur la fiche de personnage afin d’expliquer comment créer son héros, définir ses traits, compétences, attributs, etc. ;
- 2 : L’Équipement (18 pages) définit la monnaie du jeu, les armes et armures, les items alchimiques et autres biens et services ;
- 3 : Les Règles du Jeu (24 pages) explique les règles (complexes ?) du jeu, en commençant par le système de résolution, suivi des mécanismes secondaires, des attributs spéciaux des PJ, de la magie, des combats, de la santé et des PNJ ;
- 4 : Portrait de la Grèce (46 pages) permet la transition avec le manuel du meneur et décrit le cadre du jeu, le décorum très complet de la Grèce vers la fin de l’Antiquité, avec des informations sur les villes, la politique, les factions, les objectifs et les enjeux entourant le retour des dieux et des personnages emblématiques de la mythologie ;
- 5 : Les Dieux et leurs Desseins (38 pages) livres des informations détaillées sur les divinités grecques au cœur du jeu, allant de leur apparence à leurs objectifs, en passant par leur localisation, tandis que les dernières pages du chapitre s’intéressent aux Titans ;
- 6 : Monstres et Créatures fabuleuses (30 pages) fait office de bestiaire complet avec les créatures les plus extraordinaires de la mythologie grecque ;
- 7 : Scénario : Sifflent les serpents… (10 pages) permet de se lancer dans l’aventure avec une trame d’introduction intéressante, alternant entre phases musclées et complots politiques, et surtout truffée d’éléments pour enchaîner avec une campagne.
Le livre se termine sur une fiche de personnage au format A4, tandis que les couvertures internes affichent une carte sommaire de la Grèce antique.
Univers : Faille mytho-temporelle bien pensée
Il fut un temps où la mythologie grecque était ma passion. Je m’y intéresse moins aujourd’hui mais cette histoire romancée de la Grèce antique m’a accompagné une partie de mon enfance et adolescence. J’ai écrit des fanfictions, lu des romans et des bouquins d’histoire, regardé Hercule et Xena (ben oui, dans les années 90, c’était bien, OK ?). Bref, j’étais un amateur non-averti de mythologie grecque, avant de m’intéresser à des univers radicalement différents. Mythic Battles Pantheon m’a envahi de souvenirs empreints de nostalgie. “Tiens, mais je le connais ce personnage, !” ou encore “Ah oui, ce bon vieux Achille et le point faible le plus ringard de l’Histoire”. Plus sérieusement, Mythic Battles Pantheon m’a donné envie de jouer dans son univers. C’est à mon sens le principal défi d’un jeu de rôle de ce type.
Mais en quoi consiste Mythic Battles ? En gros, les portes du Tartare se sont rouvertes, titans et dieux se sont livrés une guerre sans merci, ces derniers ont perdu leur immortalité et… l’Humanité peut enfin souffler et se reconstruire durant l’Âge de l’Espérance. Le souci, c’est que les manigances politiques n’ont pas cessé et que le monde est en proie aux créatures d’antan sorties des Enfers. C’est là qu’interviennent les PJ, dans la peau des réincarnations de héros mythiques tels qu’Ulysse et Achille. Ou en incarnant de nouveaux héros. Tous doivent accomplir de hauts faits et (re)gagner de la puissance dans ce climat à l’optimisme fragile. Un très bon pitch, pour un jeu qui offre par ailleurs des dizaines de pages de décorum pour concevoir sa propre campagne. Et ça, c’est très bien !
Design & lisibilité : Y avait des relecteurs au balcon
Là, je suis tout de suite plus mitigé. Pas grand-chose à redire sur la structure et la gestion de l’espace. La police d’écriture est parfaite, le texte est justifié, le cadre de chaque page lui donne un brin de couleur tout en restant sobre. De même pour les cadres de conseils et autres tableaux qui atténuent la monotonie de la lecture. Jusque là, pas le moindre problème à soulever. Quand on lit, en revanche, on tombe sur une succession de fautes de frappe. Une parenthèse qui manque par-ci, un autre mot oublié par là. Comme d’habitude, il ne s’agit pas de fautes grave empêchant la lecture. Il s’agit tout au plus d’un menu détail qu’il convient cependant de relever pour les maniaques.
Mais la question se pose : qu’est-il arrivé aux relecteurs ? Peut-être étaient-ils distraits par les illustrations über-sexistes de Mythic Battles Pantheon. On va dire que je me répète mais en matière de traitement sexiste, on se retrouve dans ce qui se fait du plus classique. Ce qui est dommage, quand on sait que des jeux tels que Dungeons & Dragons et Pathfinder ont bien évolué ces dernières années. Avant que des On-ne-peut-plus-rien-dessiner me tombent dessus, j’invite à ce que l’on s’interroge sur la cohérence des dessins. Des armures avec un décolleté qui ne plonge plus mais qui atteint le gouffre. Ou encore l’absence d’armure inférieure. Quel est l’intérêt de telles illustrations ? Et fatalement, quand on s’intéresse aux illustrateurs, ils sont huit hommes. Coïncidence ? Je ne pense pas…
Système : Sortez les calculettes !
Pas de quoi s’affoler non plus à la lecture du système. Je suis plus que mitigé face à sa complexité (assumée, j’y reviendrai), malgré l’ambition louable des auteurs. Alors suivez bien car c’est vraiment pas simple (j’ai lu 10 fois les explications et exemples pour bien saisir le truc). Vous avez des traits et compétences associées, qui déterminent le nombre de D6 que vous lancez. Le 6 équivaut à un 0. Avec le reste, on essaie de cumuler les 5, soit naturellement (avec un 5 sur le dé), soit en additionnant. Comment ? C’est “simple” , on prend les résultats de 1 à 4 et on retire les dés qu’on veut pour donner +1 à un autre dé et obtenir 5. Exemple : j’ai un 4 et un 2. J’écarte le 2 pour donner +1 au 4, ce qui fait 5. Vous me suivez ?
Ensuite, on relance les 5 (naturels ou non) et on ajoute les nouveaux résultats au 5. Donc si j’avais 5 sur deux dés et que je les relance en obtenant 4 et 5, ça me fait un 9 et un 10. Il faut que ces nouveaux résultats soient égaux ou supérieurs à une difficulté située entre 5 (facile) et 11 (divine). Normalement, un succès suffit à réussir l’action. Alors si vous avez compris, déjà bravo (à moi, car ça veut dire que j’ai été plus clair que le bouquin). Mais je ne saisis toujours pas l’intérêt d’une telle complexité. Le livre dit lui-même que c’est complexe mais que l’objectif est de donner un pouvoir au joueur sur les dés. Je ne vois pas très bien comment mais admettons. N’y a-t-il pas des mécanismes plus simples pour émuler ça ?
Conclusion : Un peu trop classique, en fin de compte
Manquant de temps, je n’ai pas l’occasion de jouer à tous les jeux de rôle que je critique dans ces colonnes. Et je le regrette, car je suis vraiment curieux de voir ce que donnerait le système de Mythic Battles Pantheon autour d’une table hétéroclite, car je suis sûr que des gens s’en accommoderont. Ma conclusion se base uniquement sur la lecture du bouquin. D’autres éléments viennent confirmer cette impression de pourquoi-faire-simple-quand-on-peut-faire-compliqué. Je pense à la monnaie, qui troque les pièces pour des concepts. La platine devient ainsi la V4 et donc 3V4 équivalent à 30V3. Bref, malgré l’univers et le bel ouvrage du jeu, je suis déçu par son système et le sexisme dégoulinant de ses illustrations. Rien n’empêche toutefois de reprendre le décorum du jeu pour le tourner à sa sauce.
À bientôt sur Sitegeek,
Musa
Verdict
Univers
Design et lisibilité
Système
L'univers et la mise en avant des poncifs de la mythologie grecque plaira sans nul doute aux amateurs du genre. Du moins, s'ils ne sont pas distraits par les illustrations sexistes et un système pas très lisible.
En fait ce système est tiré du système de combat du jeu de plateau…
Je n’ ai pas encore tester le jet mais force est de constater qu une fois pris en main cette mécanique simule efficacement les différences de puissance entre les personnages et surtout assez simple et facile e utilisation…
Reste à voir comment elle s’ intègre dans un JDR…
Pour le sexisme, je n’ en avais personnellement pas constaté à outrance dans les illustrations, même si je ne suis pas sensible à ce genre de défaut, voir même un peu client tant que c est justifié par le background ( Aphrodite…) Ou qu on ne tombe pas dans le grand délire du port’ nawak…certaines tenues de Xena et Gabrielle par exemple ou les bikinis de mithrill ????